Orateur, chef de choeur, coach : PORTRAIT de Samuel P.

photo Samuel P.


Nous vous proposons de découvrir aujourd’hui le portrait d’un orateur peu commun, celui de Samuel Pilot.

Ingénieur des Mines, et après plusieurs années en tant que consultant au sein de BearingPoint, Samuel décide de se consacrer tout entier au chant lyrique et à la direction de chœur notamment au sein de l’Académie de Musique de Paris et de son ensemble, les Intentions Concertantes.

Dès septembre, il complètera son cursus par une licence en direction de chœur au sein du Conservatoire d’Amsterdam en plus de sa formation de coach.

Il nous explique son parcours au regard de la prise de parole en public


1- Quelle vision avais-tu de la prise de parole avant de te lancer dans la direction de chœur ? 


J’ai toujours été très attiré par la prise de parole en public.

De 2 à 4 ans j’ai grandi aux Etats-Unis. Là-bas, tous les jours, un élève de la classe prenait la parole, que ce soit pour raconter une anecdote de la vie quotidienne, ou un sujet qui nous intéressait. L’objectif n’était pas tant la thématique en elle-même que de développer l’aisance à l’oral des élèves.

Par la suite aux Mines, j’ai eu plusieurs fois l’occasion de prendre la parole en public notamment lors de ma remise des diplômes. Je me souviens avoir réalisé un détour imprévu par le micro pour remercier publiquement mon professeur d’option. Une amie est par la suite venue me voir car elle avait eu l’impression que j’avais apprécié prendre la parole. De mon côté, j’oscillais entre la peur de réaliser un acte spontané et l’expression d’une profonde reconnaissance envers mon professeur.

Je me suis senti à ma place, j’avais la sensation d’un véritable alignement.

Par la suite, entre 2008 et 2009, j’ai réalisé un stage ingénieur dans une usine de la banlieue londonienne. J’étais en charge d’un projet visant la standardisation des processus opérationnels. Lors d’un point réalisé avec les opérateurs, tout mon corps s’est mis à parler avec conviction et ce presque malgré moi, les mots venaient facilement. À ce moment précis, mon langage corporel devait certainement se trouver à mi-chemin entre la conviction et l’étonnement !


2- Quelles difficultés as-tu rencontrées notamment au regard de la direction de chœur ?


Mes principales craintes à mes débuts en direction de chœur à la fin de l’été 2017, lorsque je suis devenu chef assistant au sein de l’Académie de Musique, portaient sur l’autorité et la capacité à susciter l’attention.

Je me souviens notamment d’un épisode au sein de l’Académie de musique pendant les échauffements de technique vocale, où une partie des choristes discutait pendant que je parlais, un schéma que j’avais déjà rencontré en cabinet de conseil et qui se reproduisait. Cela n’était pas rassurant de prime abord pour l’activité à laquelle je me destinais, mais je me suis accroché.


3- Quelles solutions as-tu mises en place ? Quelles techniques t’ont été utiles ?


Il ne m’a pas été immédiatement spontané, face à un ensemble vocal de 100 personnes ou face à un pupitre, d’avoir de l’autorité !

J’ai par la suite compris que la maîtrise de mon sujet était également un point clé, que l’élément de résolution serait sans doute externe à l’autorité elle-même.

Je me suis par exemple aperçu qu’une plus grande place laissée à la pratique permettait d’accroître le niveau d’attention des choristes. Aujourd’hui lorsque j’énonce un point théorique, je le fais tester directement, cela me permet de conserver l’attention des chanteurs.

J’ai également travaillé sur le fait de donner plus de timbre à ma voix, ce qui n’est pas aisé lorsque l’on parle en public ! L’idée est notamment de mettre plus d’espace au niveau des résonateurs arrière (pharynx) ; j’ai en outre ajouté des harmoniques aigües pour permettre d’équilibrer le timbre, de l’enrichir et d’acquérir une meilleure projection vocale.

J’imagine également que je m’adresse aux personnes du fond, il y a une véritable dimension directionnelle de la voix.

Cela permet par ailleurs aux personnes au fond de la salle de se sentir concernées malgré la distance et une tendance accrue à la discussion.

L’enjeu était également d’inclure chacune des parties du chœur successivement, d’autant que le public se situe à 180°, il y a donc un risque élevé que les personnes situées aux extrémités décrochent.

Au cours de cette période et notamment lorsque je dirigeais l’ensemble les Intentions Concertantes, j’ai mesuré toute l’énergie que nécessite la prise de parole en public. La direction de chœur comprend aussi bien la préparation sur la dernière ligne droite, les derniers raccords avant la représentation, l’organisation logistique, la présentation des œuvres au public que la direction en elle-même…

Cela demande un réel effort à la fois physique et mental.

Pour un jeune chef de chœur, l’enjeu est aussi d’apparaître comme étant légitime aux yeux de choristes non nécessairement acquis à notre cause, et notamment lorsque les partitions choisies sont relativement complexes.


4- À présent où en es-tu dans la prise de parole en public ? 


Pour le moment je pense qu’il n’y a pas d’axes immédiatement importants, sauf éventuellement de ne pas avoir le regard qui s’échappe lorsque je réfléchis ! 


5- Au-delà même de la prise de parole en public, quels autres soft skills cela t’as principalement apporté ?


Auparavant, je n’étais pas très à l’aise avec la danse et l’expression corporelle de manière générale.

La direction de chœur est en soi une forme de danse : le corps doit faire passer la musicalité que l’on entend dans sa tête. Au départ, cette musicalité ne passait pas réellement par le corps.

Je suis passé d’une situation où j’étais donc plutôt mal à l’aise lorsque j’utilisais mon corps pour laisser transparaître cette musicalité à une situation où j’arrive à entraîner des centaines de choristes pour faire de la “air guitar” sur un air d’Offenbach !

Le théâtre musical m’a beaucoup apporté dans cette démarche. Pour que cela fonctionne, j’avais besoin de lâcher prise sur l’image que je donnais de moi-même, de ne pas avoir peur du ridicule. Et c’est précisément lorsque l’on n’a pas peur du ridicule, que l’on renvoie une image qui n’est pas ridicule !

J’ai également acquis une bien meilleure appréciation de l’énergie d’un grand groupe de personnes.

Je me suis rendu compte, notamment lors d’un atelier de construction en intelligence collective, que c’était un élément clé de la gestion d’un groupe !

Il s’agit de ressentir à partir de quel moment on peut commencer à parler, comment obtenir le silence juste avant sa prise de parole, comment être précis et concis dans les directives données pour ne pas laisser planer le doute.

Cette compétence de facilitation ou d’animation de grands groupes est un savoir-faire que je pourrai transposer à du coaching de groupe ou encore à des évènements de team building, des séminaires…


6- Quels conseils donnerais-tu à des personnes souhaitant s’améliorer en prise de parole en public?


À présent, je n’hésite plus à bien parler ! Il est en effet plus facile de placer sa voix lorsque l’on parle lentement et de manière précise, ce qui m’amène plus facilement à utiliser un langage soutenu !

Je pense qu’il est essentiel de travailler plusieurs points, notamment :

– bien exercer sa voix et savoir la déployer

– s’entrainer à être concis et précis

– avoir un corps stable sur ses appuis et ancré

Le plus important pour moi est surtout le feeling avec le public, le ressenti de l’énergie du public, qui n’est pas possible sans la pratique. 

En direction de chœur, nous faisons une petite blague sur le sujet : « lorsque tu poses un pied sur l’estrade tu perds 50% de tes moyens, tu poses le deuxième tu perds 100% de tes moyens » ! L’objectif est de passer d’un stade de compétence consciente à un stade de compétence inconsciente.


7- Considères-tu l’introversion comme une fatalité ?


Pour moi, il y a en réalité plusieurs éléments de réponses.

Tout d’abord, il n’est pas certain que l’introversion caractérise intrinsèquement une personne. Pour ma part, à certains moments la direction de chœur sera énergivore et au contraire énergisante.

Je pense de plus qu’il faut distinguer introversion et prise de parole en public. Le caractère irrémédiable de l’introversion me semble être plus une croyance qu’une réalité.

Découvrez le site de Samuel Pilot, chef de chœur et coach professionnel : www.samuelpilotcoaching.com

Ces conseils vous ont été utiles? Super ! Si vous souhaitez aller plus loin, je vous propose d’échanger ensemble : https://calendly.com/laura-ballo1993/echangecoaching

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Découvrez l’article suivant: Le trac dans la prise de parole: réussir à le gérer

Un commentaire sur “Orateur, chef de choeur, coach : PORTRAIT de Samuel P.

  1. Emmanuel Jublin says:

    Article et interview de grande qualité !
    Bravo et merci pour ce partage d’expérience
    J’ai dirigé des chœurs pendant plus de 15 ans et je ressens les choses avec une grande proximité de l’expérience partagée par Samuel
    À bientôt Laura
    Et bon succès
    Emmanuel

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